Breitling: Histoire d'une Manufacture-1

Le Temps des Fondateurs 1884-1970

En 1884, Léon Breitling fonde à 24 ans la fabrique de montres Breitling à Saint Imier, une production centrée sur le développement de montres chronographes. Dès l’origine, Léon Breitling recherche et conçoit un nombre important de modifications aux mécanismes de chronographe connus.


En 1892, la fabrique va déménager à La Chaux de Fond et s’installera dans une rue qui deviendra la rue Montbrillant (rue qui donnera son nom à la montre Breitling des années 50). La manufacture prendra alors le nom de "Léon Breitling, Montbrillant Watch Manufactory". Au décès de Léon Breitling en 1914, son fils, Gaston, va prendre les rênes de la fabrique familiale, à seulement 30 ans.

Breitling Gaston et ses montres chronographes
Breitling reste une marque horlogère indissociable de la conquête du ciel, le chronographe Navitimer es, par ailleurs, le modèle de montre bracelet qui vient spontanément à l’esprit de tout amateur d’aviation, retour sur la vie d’une manufacture consacrée à l’aviation et à l’automobile sous toutes ses formes depuis son origine avec une quête, sous l’impulsion passionnée de ses fondateurs qui va  révolutionner la manière d’utiliser une montre lors d’un déplacement que ce soit sur terre ou dans le ciel.


A l’origine était l’ horloge, et l’homme l’utilisa positionnée au sommet des clochers ou des bâtiments publics, quelquefois, de très rares personnages la portaient en gousset ou certains autres l’utilisaient sous forme de pendulette, comme les fameuses pendulettes « d’officiers d’Empire » dans la marine pour naviguer de façon précise les montres furent utilisées accrochées à un support parfois amovible sur le pont des navires, mais quoi qu’il en soit, à l’aube des années 1900, le progrès technique lié au moteur mis en balance cet usage tri centenaire d’utiliser un garde-temps.

Breitling Les Voyages en 1910
Difficile lorsque l’on a les deux mains occupées à contrôler des véhicules qui vont de plus en plus vite, de lire l’heure autrement que sur un tableau de bord. Difficile de loger une pendule dans ces mêmes tableaux de bord : il faudra miniaturiser. C’est ce à quoi, en 1884, Léon Breitling va s’employer à faire dans un premier temps avec la conception de compteurs ou de chronographes de petite taille, supportant les chocs modérés et surtout protégés des intempéries liées à un usage plein air puisque « le chauffeur » est en partie au contact des éléments.


 La maitrise de la vitesse des véhicules et l’importance de leur équipement augmentant, il devenait indispensable de miniaturiser, car l’usage d’un garde-temps dans un tableau de bord se révéla totalement impossible en employant les pendules ou horloges de cette époque.

Plus tard, dès l’essor de la vitesse et des expéditions trans continentales comme la croisière jaune ou l’invention de l’avion il fut inconcevable de ne pouvoir emporter un garde-temps à son poignet.
Mais qui dit vitesse dit navigation plus précise et compte tenu de ces usages, la notion de capacité d’emport devint de plus en plus importante.
Plus la masse totale en charge était importante, plus le rayon d’action devenait limité et pour allonger l’autonomie de ces véhicules il était, pour des raisons évidentes de rationalité important de ne pas emporter lors des voyages deux instruments ayant une même fonction. …une des solutions qui émergea comme une évidence à ce moment : fut de porter un chronographe au poignet.


 Et c’est pendant la première guerre mondiale, en 1915 que Breitling va commencer à mettre à disposition des forces armées, un chronographe-bracelet  doté d’un poussoir de chronographe indépendant qui va avoir pour fonction de rendre possible à l’extérieur du cockpit, la lecture et la mesure précise du temps, car pendant le conflit, la mobilité devint un enjeu majeur et pour gagner en efficacité, les postes d’observations embarqués des navigateurs, s’éloignent de plusieurs mètres afin d’augmenter leur champ de vision.

C’est aussi dans un souci de sécurité en atténuant les effets ravageurs d’un tir groupé bien ajusté que le navigateur ou l’observateur va s’éloigner du pilote ou du chauffeur et perdre cette lecture directe du temps passé sur l’horloge de bord. La vitesse maximale possible de son engin augmentant considérablement, le pilote va devoir chronométrer précisément ses branches de navigation afin de ne pas passer à côté de son objectif.
 
Breitling compteurs de bord USAAF

Tous ces éléments vont aboutir à concevoir, en 1934 l’ajout d’un second poussoir et le développement du chronographe 170 juste avant la seconde guerre mondiale.

Breitling aura cœur à répondre aux importantes commandes des pays qui se préparent à entrer en guerre, et va une fois de plus se dépasser, pour mettre en production ce chronographe deux compteurs, animé du robuste mouvement venus 170, antichoc et capable de résister à des accélérations importantes. 

Breitling Chronographe 170 Pilot Watch

Largement distribuée en dotation après le milieu de la guerre, cette montre militaire accompagnera dans leurs nombreuses missions : les pilotes de la Royal Air Force et bien d’autres.  Elle est reconnue pour être celle qui a donné ses lettres de noblesse à la marque et qui a servi de base de départ à la conception de la Navitimer et du cahier des charges des chronos type 20 des pilotes de chasse des années 50. 

Breitling Pilot chronographes Royal Air Force Lancaster 1944
Les Anges ont des ailes pour nous sauver, La Navitimer également.


Ironie du sort, ces années signent également une augmentation des accidents dus aux problèmes rencontrés en vol, comme le crash à l’atterrissage du Lockheed Constellation d’Air France dans lequel était Marcel Cerdan le 28 Octobre 1949, aux Açores, un accident dû à une erreur de navigation qui va durablement marquer l’opinion mondiale et inspirer à Edith Piaf son célèbre Hymne à l’amour.


Car à l’aube des années cinquante, les voyages prennent une nouvelle dimension, de nombreux pilotes qualifiés sont disponibles à la suite de la guerre et les progrès permettent de faire des avions qui vont plus loin, plus vite et plus haut. Avec l’usage de l’avion à réaction c’est l’essor des compagnies aériennes et la multiplication des voyages. Dans le cockpit, trois personnes : deux pilotes et un mécanicien. Tous les trois ont besoin d’un chronographe capable de mesurer le temps et d’une règle à calcul pour convertir et vérifier une multitude de variables comme par exemple : la distance, la vitesse, la consommation de carburant, la dérive due aux « jet-streams » et le temps de vol.


Un défi que Breitling relève aussitôt pour créer en 1952 ce qui deviendra indissociable de l’uniforme des nouveaux rois du ciel des années cinquante et soixante : La Navitimer (Dont vous trouverez l'histoire en suivant ce lien).

Breitling Navitimer Superconstellation TWA
La Navitimer réunit ceux qui s’aiment…


Le Calibre Vénus 178, va être une des composantes qui vont permettre de à Breitling de résoudre l’équation :

Temps de vol exact + paramètres de vols justes et contrôlés = Sécurité.


Un chronographe sur lequel le pilote visualise heures, minutes et secondes en position centrale assorti d’un rappel sur trois mini compteurs afin de totaliser le temps de vol :


Résultat : le pilote contrôle aisément le temps durant sa procédure d’approche et se reporte à sa montre et ses graduations pour établir ses changements de cap ou ses reports. Car le chronographe Navitimer facilite toutes les procédures : décollage, atterrissage, fréquence des messages avec les contrôleurs aériens en entrée ou sortie de zones, le confort d’utilisation qu’elle procure en fait un véritable outil à la disposition de la communauté de l’Air.


Breitling Navitimer AOPA Sixties

Elle sera par ailleurs recommandée par L’AOPA (Association Américaine des Pilotes et des Propriétaires d’Avions) et deviendra extrêmement populaire dans les cockpits.

Un décollage des ventes aux allures de premier surbooking horloger de l’histoire...


Incidence de ce succès : les stocks disponibles de mouvement Vénus 178 allaient se révéler insuffisant et il faudra supporter une attente de plusieurs mois afin d’obtenir le précieux slot qui permettra de recevoir ce nouveau sésame aux ailes dorées, une situation pénible tant pour Breitling que pour ses clients potentiels.


Breitling Navitimer Venus 176 et Valjoux 72
               Calibre Venus 178                                            Calibre Valjoux 72

 En 1954 pour faire face à cette pénurie, Breitling décide d’utiliser un mouvement Valjoux 72, (comme dans le non-moins célèbre Cosmograph Rolex Daytona) pour satisfaire la demande toujours aussi importante, cette série très prisée par les aficionados va se révéler être un des best sellers horloger du milieu des années cinquante et reste, de part sa production limitée, un des grands objectifs d’acquisition de tout collectionneur.


Fidèle à ses origines et fort de la notoriété de la Navitimer, les années suivantes Breitling va continuer à s’imposer comme le fournisseur attitré de l’aviation mondiale et il ne fut pas rare depuis cette époque, de trouver dans les cockpits de Boeing 707 ou d’autres, une montre, instrument de bord, signé par la marque.

Une notoriété telle qu’elle sera portée par de nombreux pilotes militaires, comme par exemple le célèbre aviateur et pilote d’essai du corps des Marines, Scott Carpenter, connu aussi pour avoir été sélectionné par la NASA dans le programme de vol spatial orbital Mercury.

Breitling Cosmonaute Scott Carpenter Mercury 7 NASA

Le 24 mai 1962, avec sa Breitling Navitimer au poignet au-dessus de sa combinaison de vol, l’astronaute s’envole pour boucler un vol orbital de 4 heures et cinquante deux minutes aux commandes de la capsule Aurora 7 de la mission Mercury 7.

Va s’en suivre désormais une déclinaison « cosmonaute » commercialisée en parallèle de sa version aviation, une variante de commercialisation toujours en vigueur, et disponible de nos jours et qui diffère de cette dernière par un cadran des heures étalonné en 24h pour disposer du temps de référence en phase exacte jour/nuit lors des pertes de ces références dues au vol orbital.

La fin des années soixante qui va voir le Chronographe Omega Speedmaster accompagner Neil Armstrong sur la Lune avec le programme de la Nasa Apollo signe le début de la quête de performance de tout l’écosystème horloger, quête qui récompensera le marché mondial des années soixante-dix de nombreux modèles automatiques ou à complication.


Breitling prend la décision de changer le mythique mouvement Venus 178 qui animait sa Navitimer et par anticipation de faire évoluer son modèle en le dotant du mouvement Valjoux 7740 qui offre le bénéfice de l’indication de la date.  La réaction du monde de l’aviation ne se fait pas attendre, c’est encore un succès et cette montre qui approche de son vingtième anniversaire reste toujours farouchement portée par ceux qui passent la plupart de leur temps dans le ciel. Un seul point d’orgue, en demi-teinte, le célèbre logo AOPA ne va plus pendant une longue période, orner les cadrans de ses modèles (il faut noter qu’à ce moment la Glycine Airman s’impose comme l’étoile montante de la communauté de l’Air, forte de sa notoriété chez les pilotes de chasse américains)

Breitling navitmer chronomatic 1969 watches vinatge


Et en 1969, alors que l’homme pose pour la première fois le pied sur la lune, au début de la période qui a vu naitre le Space Art, et pour contrer certainement le succès d’estime grandissant qui accompagne le Speedmaster d’Omega ou le modèle Astronaut de Bullova depuis qu’ils accompagnent dans l’espace les cosmonautes de la Nasa du programme Apollo, Breitling remanie sa gamme en s'ouvrant au design des années 70 et à la technologie du Quartz....

Avec la disparition de la lignée des fondateurs, une période sombre va s'ouvrir pour Breitling dont la suite de l'histoire (que vous trouverez en suivant ce lien) sera synonyme de démembrement vers la fin des années 70...

Plus tard dans les années 80-90, sous l'impulsion de Ernest Schneider, l'ancien militaire passioné d'aviation, l'industriel déja aux commandes de la marque Horlogère SICURA, va redorer les ailes de Breitling et faire revenir la marque au premier plan de l'industrie horlogère.




Breitling Pilot Chronograph Venus 170 Circa 1941

Breitling Pilot Chronograph Venus 170 Circa 1941

Le Chronographe des officiers pilotes de l'USAAF

Breitling Navitimer 806 AOPA  Mouvement Venus circa 1959

Breitling Navitimer 806 AOPA Mouvement Venus circa 1959

Le Graal du pilote AOPA des sixties, celle qui a forgé la légende